Quand j’avais dix-sept ans, j’étais déjà plus très sérieux. J’avais arrêté de fumer pour pas me faire assimiler aux sérieux, car je n’me voyais pas passer toute mon siècle dans un milieu de culs sérieux.
Le risque-tabac me paraissait tout plat au regard de ce que pourrait être une grande chose dont j’avais entendu parler : le risk capital.
Aussi lui ai-je présenté un projet, dont la substance est ci-dessous.
PROJET
Nota – Jusqu’à preuve du contraire et modification subséquente, ceci-bas exprime le génie de la Foutraque Encyclopédie (R). Tout ce qui sera jamais énoncé concernant la Foutraquie est sous licence CC, seule protection autorisée concernant la marque Foutraque Encyclopédie(R) ainsi que les productions réalisées ou rêvées sous cette fière bannière.
Foutraque Encyclopédie
But : produire une Encyclopédie foutraque d’informations, aussi instructive que mordante, extravagante et surtout mal-pensante, pour dégripper des vocables comme : nature, enseignement, crise migratoire, amour, sécuriser, FMI, associations, bio, guerre, pollution, populisme, travail, démocratie, crise sanitaire, et mille autres z’encore…
00- Une « entrée » de l’Encyclopédie peut être un mot, ou un ensemble de mots : des noms communs ou des expressions comme « Loi doit rester à la force ! », ou « Rien faire ? »
1- Chaque « entrée » est rédigée, puis « présentée », par un groupe de 2 personnes au moins. En d’autres termes, elle résulte d’un travail de collaboration. Cette tâche inclut obligatoirement force disputes entre les rédacteurs.
Quand une personne (ou plusieurs) prend l’initiative de rédiger une « entrée », elle commence par « défricher » le sujet, en vue de « présenter » à d’autres personnes ne serait-ce que quelques aspects de ce qu’elle souhaite développer.
Si une « entrée » du même nom a déjà été développée, applaudissements sont donnés à ce qu’il en naisse une nouvelle : c’est tout-à-fait dans l’esprit nataliste de la foutraquie.
2- Les « présentations », y compris celles du « défrichage », se font par oral, devant un public comptant 49% d’étudiants de la Foutraque U, c’est-à-dire des personnes ayant déjà rédigé une ou des « entrées », ou étant engagées dans cette tâche, et 51% de personnes sollicitées au hasard dans la rue. Nota : pour la phase d’initialisation, cette règle connaît obligatoirement des aménagements, sous peine de sanctions…
3- Une « entrée », une fois rédigée, est constituée de « bouts » le plus disparates possibles, donnant obligatoirement du thème traité une vue bariolée voire bancroche – et présentant le plus possible de mignonnes contradictions -, faute de quoi ça risque de rien dégripper du tout du tout !
4- Ces « entrées » sont organisés de manière à être présentés oralement, par « bouts » au cours d’une séance constituée d’enchaînements de périodes de six minutes maxi :
. un premier « bout » brosse un aspect du sujet traité pendant ces quelques minutes, puis la séance s’arrête au stop pour laisser aux auditeurs ébahis au moins autant de minutes pour tenter de se rappeler ce qui vient d’être dit, y réfléchir s’ils en sont capables, entreprendre (un échange loufoque avec) la voisine, bâiller, aller pisser, etc.
. puis un autre « bout » est proféré par le-la-les conférenciers durant encore un maximum de six minutes, et ainsi de suite, après le stop, jusqu’à extinction des feux.
On peut admettre que, pour présenter un « défrichage », un ou deux « bouts » peuvent suffire. Par contre, une fois la rédaction de l' »entrée » achevée, ne serait-ce que provisoirement, alors là, elle est « présentée » selon le même processus durant une heure, trois heures, dix heures …ou plus, le cas échéant, et toujours jusqu’à l’extinction des feux après le stop..
Des versions écrites peuvent être exceptionnellement autorisées, pour peu qu’il y ait des sourds assez mal entendants dans l’assistance, et à leur seule intention exclusive.
5- La mémoire d’une « entrée » peut, ensuite, être modifiée indéfiniment par ses auteurs (mais pas par seulement une partie de ses auteurs !), avant d’être à nouveau présentée.
Au vu et au considérant de l’absence de réponse de la part du risque-capital, manifestement peu ventureux, je me suis attristé.
Mais bon, c’est p’t’êtr’ bien que s’il n’est pour encore pas à la bonne hauteur, ce serait p’t’êtr’ pas de sa faute après tout, me suis-je raisonné.
Ou alors, c’est parce que je tiens à la licence CC ? Idiots de peu risqueux : l’avenir sera gratuit, ou ne sera pas, voyons !
Je ne pouruivis point les idiots, cette fois. Dans une autre existence peut-être ? me dis-je donc.
Patience et longueur du pied font plus que crasse ou cirage, m’avait inculqué ma grand-mère bottière.
Puis, voilà qu’un jour, fatalement bien obligé, j’ai eu mes 18 ans.
Et j’ai alors imaginé qu’une Foutraque U(R), ça serait un super hommage à Michel Colucci et donc, aussitôt, hop !
PROJET de réseau des universités du cœur
Créons – grains de sable certes dérisoires dans des rouages de plus en plus mahousses, et encore assez bien huilés pour durer si on s’bouge pas – créons, donc, mille universités du cœur, sans chef, sans centre, sans profs et sans compte en banque, associant de fait des gens de tous poils qui veulent vraiment comprendre ensemble ce que sont les temps qui courent.
Libérons Michel Colucci !
Apprenons à lire et à délire !
Et commençons ainsi quelque chose de complètement neuf, comme aurait dit – un an de philo, ça va m’aider maintenant ou jamais, me suis-je dit – madame Arendt.
Or – un an de plus lui avait sans doute alourdi la digestion des comptes -, le risque-capital ne s’était pas encore réveillé.
C’est donc p’t’êtr’ bien que ce drôle ne goûte définitivement pas ce type de risque, me suis-je raisonné.
Et j’en suis donc encore resté là cette fois.
Si ce n’est qu’un beau matin, dans la queue à la boulangerie, surgit l’éclair d’un superbe alexandrin :
« En chœur et joyeusement, réveillons Colucci ! »
J’ai dû le clamer un peu fort, vu que les gens m’ont regardé étonnamment.
Je ne désespère point.
Je suis jeune.
Mon p’tit doigt dit que c’est absolument ça qu’il faut faire.
Et sans le capital, puisqu’il veut pas !
Liberté – Justice – Fraternité !
Et Merde à Vauban !
Putain… Pour la banderolle, je choisis lequel ?
Aïe, pour une banderolle, faut être au moins deux !
Et pour « Commençons quelque chose de complètement neuf ! », il en faut même trois ou quatre…
Ça y est, j’ai trouvé ! J’vais commencer par tendre la perche autour de moi :
« Tu veux bien me donner un coup de main ? J’ai une banderolle à promener. »
Et Merde au risque-capital ! parole de Zinzin !