S. a déjà consacré pas mal de son temps aux éoliennes personnelles, à leur fabrication, à la diffusion de savoirs-faires à ce sujet, à la capitalisation des expériences y compris des échecs !
– En général, on camoufle les échecs, non ?
– Je trouve ça regrettable !
– Toi, tu fais l’inverse : dans ton atelier sont en bonne place les restes des éoliennes qui ont cassé.
– Je les expose, et j’en rends compte aussi dans le réseau auquel j’appartiens. Nous nous sommes constitués dans la foulée de l’expérience d’un constructeur autodidacte écossais, et nous partageons nos expériences, nos mises au point, nos découvertes. C’est un peu à l’image du réseau d’informaticiens élaborant Linux en réseau.
– Vous êtes tous autodidactes ?
– Oui, plus ou moins. Mais des professionnels nous donnent un coup de main. Par exemple, près d’ici, j’ai la chance de pouvoir compter sur un ingénieur en retraite. Avec lui, nous avons des échanges qui ne trouveraient pas leur place si nous travaillions dans la même boîte : ce fonctionnement en réseau de volontaires crée des manières de faire et des relations tout à fait inédites.
– La question de l’énergie t’intéresse particulièrement.
– Elle est posée d’une manière invraisemblable, c’est comme une grande machine dont les organes sont dissociés : on prend de l’uranium ici, on produit ailleurs, et ça produit des déchets dont on fait une question à part. Il faut expérimenter d’autres manières de faire !
– Avec des éoliennes, l’artiste de spectacle que tu es aussi veut intervenir dans le débat ?
– Oui, j’élabore un projet : aller, avec un chapiteau dont chaque mât portera une éolienne, présenter un spectacle dans des lieux où il y a conflit au sujet d’implantation de parcs éoliens, et laisser sur place une trace de mon passage.
– Par exemple ?
– Par exemple une sculpture comme la ‘machine à remonter le vent’ que tu vois ici.
S. me désigne une éolienne munie d’un siège – sans doute pour le voyage – qui produit plus de ‘vent’ qu’il n’y en a alentour.